Festival EXTRADANSE
Les multiples imaginaires de la danse du mouvement !
En tant que spectatrice mais aussi stagiaire au service de « médiation et action artistique », j’ai eu la chance de découvrir le festival EXTRADANSE proposé par POLE-SUD, Centre de Développement Chorégraphique National de Strasbourg, du 19 mars au 5 avril.
L’édition 2019 invitait des jeunes chorégraphes venant de toute l’Europe (Pays-Bas, Belgique, Suisse, Italie, Portugal) mais aussi au-delà des frontières européennes (Israël, Maroc) pour nous faire voyager pendant trois semaines dans des imaginaires et des langages chorégraphiques à la fois surprenants, poétiques et hypnotiques mais aussi pluridisciplinaires.
Le mardi 19 mars annonçait le début de ces trois semaines de rencontres d’échanges et de partages. C’est avec le chorégraphe et danseur catalan Pere Faura que le festival a démarré. Pour la deuxième pièce de sa trilogie Sweet Tyranny sous-titrée « A stage analogy between dance as evasion and dance as a profession » [une analogie scénique entre la danse comme évasion et la danse comme profession], Pere Faura puise à la fois dans la danse contemporaine et la culture pop. Les tableaux chorégraphiques défilent devant nous sous le ton de l’humour et du partage. Il déconstruit et remixe les chorégraphies de John Travolta et Patrick Swayze, et nous replonge dans des séquences de films culte comme ceux de Dirty Dancing et Flash Dance. Pere Faura et sa troupe de huit danseurs réussissent à faire vibrer le plateau avec beaucoup d’enthousiasme, de bonheur et d’évasion. Les spectateurs ne pouvaient s’empêcher de danser sur leur siège, et même de chanter pour accompagner les derniers mouvements de Pere Faura, le roi du disco.
Deux jours plus tard nous retrouvons le danseur catalan dans un solo intitulé Striptease. Avec une nouvelle touche d’humour, le chorégraphe questionne dans cette pièce la place du corps du danseur, entre objet artistique et sexuel, face à un public où la pudeur et le voyeurisme de celui-ci sont exposés et filmés. Un corps étudié comme si nous nous retrouvions dans une conférence dansée, essayant de décortiquer les mécanismes du désir.
Nous continuons ce voyage chorégraphique avec la pièce Halfbreadtechnique, proposée par l’artiste suisse Martin Shick. On pourrait s’attendre à un solo de danse à première vue, mais Martin Schick a décidé de nous laisser sur notre faim. Deux minutes environ de danse en introduction qui s’ensuivent d’un exposé déconcertant sur les tendances post-capitalistes, les cadres et les conventions du spectacle vivant. Ainsi, le performer nous invite à plonger dans sa pensée où le sens du partage et l’échange avec le public étaient au rendez-vous.
Dans Together_till the end présenté les 22 et 23 mars, Arno Schuitemaker nous dévoile un duo intense et frénétique où l’énergie des corps transpire. Pendant vingt-cinq minutes, Ivan Ugrin et Quentin Roger répètent et font évoluer un même mouvement tournoyant, jusqu’à la fin. Le chorégraphe néerlandais joue avec les lumières du plateau pour faire émerger petit à petit des rotations de buste et des accents du corps, au rythme transcendant de la musique.
La deuxième semaine du festival débutait avec un trio de danseurs accompagnés par un musicien pour We were the future. La chorégraphe israélienne, Meytal Blanaru, a développé l’écriture chorégraphique de son spectacle dix ans auparavant en puisant dans la méthode Feldenkrais. Cette technique est avant tout un travail et sur la prise de conscience du mouvement et sur nos habitudes corporelles dans l’espace. Une écriture très poétique est née dans la fusion de cette technique avec la danse contemporaine. We were the future est la troisième pièce de Meytal Blanaru qui explore la thématique du souvenir et de la mémoire, comme actes de création. Une chorégraphie hypnotique et délicate qui captive nos sens.
Ensuite, la nouvelle création d’Ann Van Den Broek, Accusations, était présentée au Théâtre Hautepierre les 27 et 28 mars. Pour Accusations, elle s’inspire d’un texte d’Instropections de Peter Handke et plus particulièrement de son monologue Auto-accusation. Un défilé de mouvements aux sons amplifiés par des micros et des écrans vidéo se présente à nous dans une puissance et présence saisissantes. Ces âmes tourmentées martèlent le plateau avec un humour noir et une force d’introspection fascinante.
Pour finir en beauté ce festival qui a accueilli au total onze spectacles, la compagnie Massala, fondée en 2010 par le danseur et chorégraphe Fouad Boussouf, a enflammé le plateau du théâtre Hautepierre, et embellie les yeux des spectateurs. Leur nouvelle création Näss (Les Gens), est un métissage culturel mêlant à la fois danses régionales et guerrières du Maroc (le taskiouine et la reggada) ainsi que danse hip-hop aux acrobaties saisissantes. Cette fusion chorégraphique crée une énergie et un rythme venant du plus profond des corps. Les sept danseurs forment une belle masse humaine piétinant et tremblant, dans une même union.
Marion Fouquet, ambassadrice Carte culture
Grâce au dispositif missions professionnelles ALL-SHS de l’Institut de Développement et d’Innovation Pédagogiques (IDIP), la Carte culture propose aux étudiants de devenir des « Ambassadeurs Carte culture ». Se glisser dans la peau d’un spectateur et faire part de leur expérience culturelle : la Carte culture par les étudiants, pour les étudiants !